Argentine désargentée
Posté par bifaceb le 12 septembre 2014
Nous nous souvenons de ce » coup de tonnerre de l’été » : après plus de dix ans de conflit juridique et financier,
un tribunal d’appel de New York, présidé par le juge Griesa, 84 ans et qui les paraît bien a, en Juillet, interdit à l’Argentine de rembourser certains de ses créanciers tant que deux fonds américains « vautour » n’auraient pas été remboursés.
les deux articles ci-dessous résument l’historique, qu’un peut supercondenser en une phrase :
La minorité de prêteurs qui n’a pas voulu accepter la décote au moment de la restructuration de la dette argentine ne veut pas accepter que ceux qui ont « joué le jeu » d’une diminution de leurs avoirs et ont signé un accord avec le débiteur soient remboursés avant eux et ont obtenu de la justice américaine qu’elle bloque, puisse faire saisir partout, les remboursements éventuellement effectués.
L’Argentine se trouve ainsi en quasi défaut de paiement, alors même qu’ elle essaye, propose de verser de suite 539 millions de dollars de son échéance , qu’elle peut rembourser tous ses créanciers, les coopératifs sur la base de leur créance décotée, les non coopératifs sur la base de la créance totale. Mais, pour accepter leur décote, les créanciers ont fait signer à l’Argentine une clause qui indique qu’elle ne peut faire de meilleures conditions de remboursement à d’autres, sans s’aligner pour les coopératifs.
Cet imbroglio dure depuis plus de 10 ans,
met en cause implicitement la crédibilité, et donc toutes les restructurations de dette publique,
une opération qui remonte pourtant à la nuit des temps et a permis bien des fois de purger les finances défaillantes des Etats.
Cette affaire sème le trouble, pourrait remettre en cause la restructuration de la dette grecque, et maintenant, par l’attitude agressive des fonds vautour, menace l’activité des entreprises multinationales qui travaillent avec l’Argentine !
et pourtant, nous ne voyons pas beaucoup le FMI s’agiter, les banquiers internationaux prendre une position de fermeté pour assurer la durabilité, la robustesse du système d’échanges mondiaux, qui les fait vivre.
Ils ont l’air de beaucoup craindre les investisseurs spéculatifs et les juges américains …
Tant qu’il existera des spéculateurs pour faire passer leurs intérêts mercantiles avant le maintien du système qui a pourtant fait leur richesse, des juges pour approuver cette stratégie et lui donner force exécutoire, une organisation judiciaire qui autorise la mise en oeuvre mondiale par la force de cette décision, et un système financier, une gouvernance pour parler moderne, incapable d’y mettre fin, de trouver une solution « par le haut », nous serons à la merci de nouvelles crises, nous ne pouvons croire à un chemin de coopération pour le progrès économique et social mondial.
L’ Argentine face aux fonds vautour
Photo prise le 1er août 2014, dans le quartier d’affaire de Buenos Aires. L’Argentine endettée auprès de « fonds vautours » a déposé une plainte contre les Etats-Unis le 7 août 2014.REUTERS/Marcos Brindicci
La faillite argentine a été le feuilleton de l’été. Avec une nouvelle péripétie la nuit dernière : le sénat argentin a voté une loi prévoyant le remboursement des créanciers non plus à New York mais à Buenos Aires ou à Paris. Ce vote entérine l’astuce trouvée cet été par Kristina Kirschner pour rembourser ceux qui ont accepté de lourdes pertes dans la restructuration sans rien céder aux fonds vautours. Les créanciers sont d’ordinaire payés via la Bank of New York. Mais la justice américaine qui a donné raison aux fonds vautours bloque l’argent déposé par l’Etat argentin pour honorer les prochaines échéances. Certains investisseurs, dont le fond de Georges Soros, ont donc entamé des poursuites contre l’Argentine pour exiger le paiement rubis sur l’ongle. D’où l’idée de délocaliser les opérations de remboursement, en Argentine ou en France un pays où le gouvernement cherche un appui. Le temps presse, le prochain versement est prévu à la fin du mois. L’Argentine veut ainsi démontrer qu’elle n’est pas en défaut de paiement partiel comme l’affirment les agences de notation Mais c’est loin d’être gagné car les obstacles sont multiples et toujours plus sophistiqués. D’abord les créanciers sont libres de refuser l’arrangement proposé. Et puis les fonds vautours qui ont obtenu gain de cause aux Etats-Unis sont déchainés. Ils traquent un peu partout dans le monde les avoirs argentins susceptibles d’être confisqués. Toute personne ou entité détenant du capital argentin est dans leur ligne de mire, pourquoi pas les établissements français qui accepteront de jouer les intermédiaires ? Ce bras de fer permanent est une épée de Damoclès sur une économie argentine déjà mal en point. Même si les gouvernements successifs ont leur part de responsabilité dans la mauvaise gestion des finances publiques, le défaut organisé par l’Etat argentin en 2001 a accouché d’un monstre juridico financier qui empêche durablement le pays de se remettre en selle. Et qui au delà du cas argentin, détruit la confiance sur le marché de la dette souveraine. D’où les initiatives pour trouver un règlement universel aux restructurations des dettes publiques La semaine dernière les principaux acteurs, les banques, les émetteurs de dette, tous réunis au sein de l’association internationale des marchés de capitaux basée en Suisse se sont mis d’accord sur une consigne simple : quand les trois quarts des créanciers acceptent une perte, les autres sont obligés de se plier à cette décision. Et maintenant ce sont des économistes, des anciens chefs de gouvernement qui en appellent aux Nations Unies pour réguler les faillites des Etats. Emmenés par le prix Nobel Joseph Stiglitz, les signataires demandent un mécanisme de gestion ordonnée comme il en existe déjà pour les faillites privées. Pour éviter une gestion basée par la seule loi américaine, pourquoi pas des casques bleus de la finance en cas de défaut d’un Etat ?
L’historique
L’Etat argentin a perdu fin juillet 2014 son procès en appel contre une décision de justice américaine l’obligeant à payer 1,33 milliard de dollars (994 millions d’euros) à des fonds spéculatifs qui avaient refusé de subir de lourdes décotes lors de la restructuration de sa dette en 2001 En 2001 l’Argentine sombre dans une crise économique grave. À l’époque, le pays annonce qu’il est dans l’incapacité de rembourser sa dette extérieure qui s’élève à près de 100 milliards de dollars. Les deux fonds Elliott et Aurelius, sautent sur l’occasion et rachètent à très bas prix (20 % de leur valeur) les titres dont une partie des investisseurs cherchaient à se débarrasser. L’Argentine propose à ses créanciers de les rembourser en partie. 93% des créanciers acceptent, mais 7% refusent. Parmi ces 7% se trouvent les deux fonds spéculatifs Elliott et Aurelius.Ils refusent de participer à la renégociation de cette dette et se tournent alors vers les tribunaux de New York, la juridiction où la dette a été émise, avec l’espoir d’obtenir un remboursement des titres à 100% soit 1,3 milliard de dollars. Il s’agit par exemple pour le fonds Elliott de récupérer plus de 800 millions de dollars pour une dette achetée 50 millions !! Le 16 juin, la Cour Suprême des Etats-Unis contraint l’Argentine à rembourser les deux fonds. Dix jours plus tard, l’Argentine effectue un versement de plus d’un milliard de dollars destiné aux deux créanciers. Mais le juge américain, Thomas Griesa, invalide la transaction. Il ordonne le retour de cette somme aux autorités argentines et accorde un mois de délai. Son argument : Buenos Aires doit rembourser tout le monde au même moment aussi bien ceux qui ont accepté la restructuration que ceux qui l’ont refusée. L’Argentine a les moyens de payer la somme demandée par Elliott et Aurelius. Le problème : la clause « Rufo » (Rights upon future offers), ajoutée aux accords d’échanges par Buenos Aires en 2005 et 2010. Elle précise que le pays ne peut pas proposer de meilleures offres financières aux fonds vautours, à moins d’offrir aux autres investisseurs un remboursement dans des conditions similaires. Si Buenos Aires rembourse l’intégralité des sommes dues aux fonds vautours, les autres créanciers pourraient saisir la justice pour obtenir eux aussi le remboursement total. La somme pourrait alors exploser et avoisiner les 120 milliards de dollars, or l’Argentine ne dispose que de 30 milliards de dollars de réserves de change.
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