C’est une bonne nouvelle, même si les chiffres restent modestes. D’après l’étude de l’Insee sur « Les niveaux de vie en 2013 » publiée mardi 22 septembre, les inégalités ont un peu baissé en 2013 en France, confirmant la tendance amorcée l’année précédente. « Les inégalités entre les plus modestes et les plus aisés se réduisent », constatent les experts de l’Insee.
Pour établir ce constat, les statisticiens de l’institut ont passé en revue plusieurs indicateurs. Le premier, appelé indice de Gini, varie de 0 à 1, la valeur 1 représentant le seuil d’inégalité le plus extrême. En 2013, il s’est établi à 0,291, contre 0,305 en 2012. « Ce repli, d’une ampleur inobservée depuis 1996, efface l’augmentation de 0,013 enregistrée depuis le début de la crise, entre 2008 et 2011 », souligne l’Insee. Pour comparaison, l’indice de Gini s’élevait à 0,289 en Allemagne en 2012, selon l’OCDE, et à 0,351 au Royaume-Uni.
L’autre façon de mesurer l’inégalité est de rapporter le niveau de vie des 20 % les plus riches à celui des 20 % les plus modestes. Là aussi, le constat est le même : ce rapport a baissé de 4,6 à 4,3 entre 2012 et 2013.
Ce n’est pas tout : le taux de pauvreté monétaire, mesurant le nombre de personnes vivant sous le seuil de pauvreté (60 % de la médiane des niveaux de vie), a reculé à 14 %, contre 14,3 % en 2012. Il a ainsi retrouvé son niveau de 2010. « Il s’agit surtout d’une diminution mathématique », nuance l’association ATD Quart monde, dans un communiqué. « Une baisse de 0,3 % ne peut pas se constater sur le terrain, les pauvres n’ont pas du tout vu leur situation changer. »
Le niveau de vie des 10% les plus pauvres a progressé
L’étude de l’Insee révèle également que le niveau de vie médian était de 20 000 euros annuels il y a deux ans, soit 1 667 euros nets par mois. Cela signifie que la moitié des Français affiche un revenu disponible de plus de 20 000 euros par an, tandis que l’autre moitié est au-dessous. En moyenne, ce chiffre a reculé de 0,2 % par an depuis 2008, alors qu’il avait progressé de 1,7 % par an entre 2004 et 2008.
Mais le constat est plus contrasté lorsque l’on rentre dans le détail. En effet, le niveau de vie du premier décile, qui correspond aux 10 % de Français touchant moins de 10 700 euros par an, a progressé de 1,1 % en euros constants en 2013. « C’est la première fois depuis le début de la crise qu’il augmente », souligne l’Insee. A l’inverse, le niveau de vie du neuvième décile (les 10 % percevant plus de 37 200 euros par an) a reculé de 1,8 %.
Ces tendances vont à l’encontre de celles observées au Royaume-Uni et surtout aux Etats-Unis. Outre-Atlantique, les inégalités se sont en effet durement creusées depuis le choc des subprimes, le 1 % des plus aisés s’enrichissant au détriment des 99 % autres, dénonce notamment l’économiste français Thomas Piketty dans son dernier ouvrage, Le Capital au XXIe siècle (Seuil, 2013).
Hausse de la fiscalité pour les plus riches
Comment expliquer cette spécificité française ? D’abord, la part des revenus du patrimoine, comme les loyers touchés par les propriétaires ou les rentes financières telles que les intérêts et dividendes, a baissé de 11,9 % à 10,9 % du revenu disponible de l’ensemble des ménages. Or, ces revenus du patrimoine représentent plus du quart des revenus des 10 % les plus aisés.
De même, les ménages plus riches ont été les premiers concernés par la hausse de la fiscalité appliquée après l’élection de François Hollande. A l’exemple de la création d’une tranche supplémentaire d’impôt sur le revenu à 45 %, ou encore, du plafonnement des avantages liés au quotient familial. En 2013, les impôts représentaient ainsi 27,9 % des revenus disponibles des 10 % les plus aisés, contre 26 % un an plus tôt.
A l’inverse, la progression des revenus les plus modestes est pour l’essentiel liée à la hausse des heures travaillées sur l’année, explique l’Insee. Qui souligne également que le taux de pauvreté des chômeurs a baissé de 38,7 % à 37,3 % entre 2012 et 2013 grâce à « l’augmentation des montants des allocations-chômage perçues ». Preuve que les amortisseurs sociaux français, parfois dénoncés comme trop coûteux ou mal conçus, ne fonctionnent pas si mal.